La justice? Pas si injuste !

Publié le par Boyer Stephane

Chronique RCF du jeudi 16 février 2006
Bonjour,
Les médias ont parlé énormément de l’affaire d’Outreau et les retransmissions télévisées de la commission parlementaire ont été très suivies. S’il était indispensable de réhabiliter les accusés innocentés, il est important aussi de ne pas faire croire que le système judiciaire ne serait qu’erreur et dysfonctionnement.
Avez-vous suivi une session de cour d’assise ? Avez-vous suivi un procès du début à la fin avec tout ce qu’il comporte de dureté, de débats contradictoires, d’auditions de témoins, de plaidoiries ? La session de ce trimestre de la cour d’assisse de Saône-&-Loire vient de s’achever vendredi dernier. J’ai passé deux journées entières pour accompagner une victime. La cour d’assise a prononcé des condamnations et c’est un jury populaire qui l’a fait. N’oubliez pas que chacun de nous (sauf s’il a fait des actes répréhensibles) pourrait être dans ce jury populaire. Ce qu’on entend dans une cour d’assise, c’est la souffrance et les blessures de notre monde. La jalousie et la rivalité qui entraînent le meurtre ; la convoitise qui entraîne le vol, les braquages ; la perversité qui entraîne au viol, à faire de l’autre l’objet de son plaisir. C’est cela qu’on traite dans les cours d’assise. L’histoire d’hommes et de femmes, accusés et victimes, qui sont mis à nu, au grand jour pour essayer de comprendre, de discerner ce qui a pu se passer.
Bien souvent, il y a des éléments matériels. Et il y a assez souvent des mobiles, des raisons d’avoir agi ainsi. Il est vrai que dans les histoires de mœurs, tout est plus difficile. Comment avoir des preuves quand la plupart des victimes rongées par la honte, par la peur du regard des autres ne libèrent leur parole, ne parlent qu’après des mois ou des années ? J’entends beaucoup de gens penser qu’il est facile de parler après un viol. Si vous saviez comment c’est difficile, comment cette blessure est profonde…
Personnellement, malgré l’énorme gâchis de l’affaire d’Outreau, je trouve que la justice travaille bien. J’ai vu à plusieurs reprises des président(e)s de cours d’assises écouter, donner la parole à chacun, avec parfois une patience que je n’aurais pas eue. J’ai vu des jurés qui écoutent avec attention et qui ne doivent vraiment pas bien dormir la nuit quand ils rentrent chez eux, tellement ce qui s’entend dans le tribunal est dur et souvent inimaginable. J’ai vu des avocats s’engager véritablement dans leur plaidoirie et défendre soit la victime, soit l’accusé, avec professionnalisme et cœur. C’est vraiment un lieu où l’on peut voir apparaître une vérité. Elle n’est peut être pas complète mais il se fait un vrai travail de clarté en cour d’assise.
Mais pour qu’il y ait cour d’assise, il faut tout un travail patient et lourd d’un juge d’instruction. Ces juges sont surchargés de dossier. Bien sûr, quelques erreurs peuvent se passer mais ce n’est vraiment pas la règle. Il n’y a pas besoin de siéger à la commission parlementaire pour comprendre que les moyens manquent. Malgré tout ce qu’on nous dit et les promesses, la justice manque de greffiers et de magistrats. C’est à nous citoyens de faire pression sur nos députés pour que ce budget soit honoré correctement. C’est notre devoir car si un jour nous avions besoin de cette justice, nous serions heureux qu’elle puisse se vivre encore mieux qu’aujourd’hui.
À la semaine prochaine.

Publié dans Education-jeunesse

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