La justice sur la brèche.

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Chronique RCF du jeudi 31 janvier 2008
Bonjour,
Souvent les informations se suivent et l’une chasse l’autre, notre esprit oubliant rapidement ce qui s’est dit la veille ; et puis, retenir juste ce qui se passe aujourd’hui nous donne l’impression d’être dans le coup. Mais dans ce flot des informations, il est parfois difficile de se faire une idée. Ainsi deux évènements vis-à-vis de la justice se télescopent en moi et m’interrogent.
D’un côté un trader qui a fait perdre 5 milliards d’euros à une banque et gagner autant à ceux qui ont capté son argent. Il dit volontiers que ses patrons n’étaient pas ignorants de la situation et qu’ils étaient même intéressés quand il réalisait des bénéfices. Bien sûr l’avocat de la banque rejette ces paroles et rappelle qu’on ne peut pas croire « un fraudeur ». Deux jours avant, des personnes crient à la sortie d’un tribunal. Ils n’admettent pas que les membres de leur famille, membres de l’arche de Zoé, soient condamnés à 8 ans de prison. Ils crient après cette justice, qu’ils trouvent injuste, qui ne serait que mensonge et qui nierait la vérité : ces hommes et ces femmes n’auraient rien fait de répréhensible et n’auraient voulu faire que du bien sans franchir l’illégalité des lois. Il s’agit de deux situations bien différentes parce que l’une est à l’instruction et l’autre a été jugé en Afrique.
Mais dans ces deux cas, on parle de fraude, d’injustice, de mensonge, de vérité. Pour le trader, les enjeux économiques sont tellement importants qu’il devrait être difficile de savoir vraiment le fonctionnement de cette banque et ce que ses responsables ont vraiment accepté avant de crier « Haro » sur leur employé. Pour l’arche de Zoé, les enjeux diplomatiques et politiques sont tellement considérables qu’on risque de ne pas tout savoir.
Dans tous les cas, les juges auront bien du mal à faire la vérité et même s’ils s’en approchent et que des procès l’expriment, il n’est pas sûr que cela aura autant de retentissement dans les médias. La vérité n’est pas quelque chose d’absolu, même dans la foi. On peut approcher d’une vérité historique, repérer les faits, les responsabilités de l’un ou de l’autre dans l’enchaînement des évènements, mais la Vérité certaine et absolue, il est presque impossible de l’atteindre. Le mensonge reste souvent là et puis la part de psychologie de chacun joue, le désir de « sauver sa peau » aussi peut exister. Dans toutes ces situations le monde médiatique est assez prompt à boucler les affaires, alors qu’elles demandent souvent du temps pour qu’une certaine vérité apparaisse et que les responsabilités puissent s’identifier.
Comme un tableau, c’est n’est que par petites touches successives qu’une situation peut s’éclairer et apparaître au discernement d’un juge ou de jurés. La justice sera toujours décriée : car trop souvent une des parties se sent lésée. La justice est d’abord là pour sanctionner la faute quand elle est établie et réparer quand cela est possible le tort qui a été fait. Nous disons dans l’évangile que « la vérité nous rendra libre » mais les hommes sont souvent prisonniers de systèmes, de leur psychologie, de leur image. C’est toujours un long travail qui nécessite du temps et de ne pas être coincé dans des systèmes et des intérêts gigantesques.
À la semaine prochaine.

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F
Salut Stéphane,<br /> <br /> J'ajoute à cette excellente chronique que la justice n'est jamais là pour juger d'un homme mais d'un acte - comme tu l'avais déjà décrit il y a quelques temps lors d'une chronique sur la peine de mort. Et je crois que lorsque les parties prenantes d'un jugement prennent vraiment conscience de cela, chacun se sent satisfait de la justice - qu'elle ait été équitable ou non, justice et justesse n'allant pas toujours de paire...<br /> Amicalement<br /> Fred
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