Pièces jaunes : non merci !

Publié le par Boyer Stephane

Chronique RCF du jeudi 02 février 2006.
Bonjour,
Je ne suis pas du style à repousser les demandes d’aides qui m’arrivent. À partir du moment où je peux, je partage et je soutiens. Dans tous les appels que l’on reçoit certains me semblent plus légitimes que d’autres.
Je pense en particulier à tout ce qui est soutien à des associations internationales, comme Médecins sans frontières ou le CCFD ou Amnesty International. Ces associations et plein d’autres, luttent et travaillent pour développer des projets d’accès aux soins, d’accès à l’éducation, d’accès à la terre et à ses ressources. Elles viennent, en complément des aides de différents états dans le cadre des coopérations internationales. Militer pour que ces aides d’états augmentent est bien sûr nécessaires mais les dons des particuliers sont dans ce cadre indispensable.
Cela me semble différent pour ce qui est de la campagne des pièces jaunes que David Douillet et Mme Chirac relancent chaque année. La première dame de France vient demander l’aide de tous les Français pour améliorer la vie des enfants à l’hôpital. J’ai visité des enfants malades et je comprends bien qu’ils ont besoin de continuer, quand c’est possible, leur scolarité, qu’ils ont besoin de salle de jeux, d’accès informatique, de pouvoir vivre la maladie sans se couper de leurs parents, frères et sœurs. Le site Internet ( http://www.piecesjaunes.com/decouvre/decouvre.htm ) nous annonce même qu’à Chalon-sur-Saône des chambres mère-enfant ont été aménagés dans le service pédiatrique.
Je comprends tout cela. Mais est ce vraiment normal que ce soit l’opération pièces jaunes qui permettent d’acheter mille pompes anti-douleurs ? L’accueil de parents auprès de leur enfant n’est-il envisageable que grâce à l’aide et au soutien financier de cette action ? L’opération est généreuse, elle vient permettre à des enfants de faire quelque chose pour d’autres enfants malades. Il y a dans toute la France des classes partenaires. Mais est-ce normal que la politique d’accueil, de confort, de loisirs et de lutte contre la douleur pour les enfants hospitalisés soient conditionnée à la collecte annuelle des pièces jaunes ? Personnellement, je ne le pense pas.
Les restrictions budgétaires des hôpitaux conduisent inévitablement vers ce genre de démarche. Quand on collecte les pièces jaunes, on vise toutes les personnes, pauvres ou riches. Ce n’est pas comme un gala de charité où des gens fortunés vont offrir à une cause qui leur semble juste un peu de leur argent. Je pense que Mme Chirac et M. Douillet qui connaissent bien les responsables gouvernementaux devraient demander un petit entretien au ministre de la santé. Auprès de lui, ils pourraient user de leur force de persuasion, de leur expérience d’accompagnement des structures hospitalières, pour que les choses changent en profondeur et que l’accueil des enfants malades, leur prise en charge médicale, morale et psychologique ne viennent plus dépendre en partie d’une collecte nationale.
Je sais qu’un État ne peut pas tout faire. Mais des fois, des actions de solidarité oublient le premier devoir : ne pas seulement faire de la « charité obole » où l’on donne sa petite pièce mais une vraie sensibilisation de ceux qui décident la politique. Je pense que l’argent mis dans la construction d’un nouveau sous-marin militaire (ou d’autres choix) permettrait pourtant d’améliorer la vie des enfants à l’hôpital. Mais cela, ça s’appelle faire de la politique… au bon sens du terme !
À la semaine prochaine.

Publié dans Education-jeunesse

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A
Votre chronique d’hier sur les ondes de RCF Saône-et-Loire traitant des « pièces jaunes » a suscité chez moi des réactions qui, pour être totalement personnelles, n’en sont pas moins vives. Je vous les livre donc.<br /> <br /> Si j’ai bien compris le principal de votre argumentation, l’opération est contestable puisqu’elle peut être considérée comme suppléant une insuffisance des pouvoirs publics en la matière : achat de pompes anti-douleur pour les enfants, construction de chambres permettant aux parents d’accompagner leurs enfants pendant leur traitement …<br /> <br /> « Madame Chirac et Monsieur Douillet, avez-vous dit en substance, feraient mieux de s’adresser aux responsables politiques, qu’ils doivent bien connaître, pour faire améliorer le sort des enfants hospitalisés … » <br /> <br /> Voilà un argument que je trouve bien contestable, sur un plan moral comme sur un plan chrétien : sans nier la nécessité d’une politique générale de santé publique, je pense que toute initiative ayant pour but l’aide aux malades doit être soutenue. Elle sensibilise l’opinion au sort des plus défavorisés, développe le souci de partage. Comment déplorer l’égoïsme ambiant et se montrer réservé sur une action encourageant l’attention aux souffrants ?<br /> L’Etat-providence ne peut tout traiter, il peut être aidé par l’initiative individuelle.<br /> <br /> Les enfants hospitalisés sont là, ils doivent être soutenus et aimés, toute action en leur faveur a sa valeur si elle est efficace.<br /> <br /> Une question me vient enfin à l’esprit : quand le bon samaritain a rencontré l’homme en détresse sur la route de Jéricho, s’est-il demandé si la protection et le soin des voyageurs étaient du ressort des autorités de Judée ?<br /> <br /> Voilà donc ce qui m’est venu à l’esprit.<br /> <br /> Bien à vous<br /> <br />
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